Maurice Jacquet
Tous les familiers du stade Marcel-Picot connaissent la tribune Jacquet, mais savent-ils qui est l’homme qui se cache derrière ce nom ? Pas sûr! Et il est même probable que certains supporters pensent qu’il s’agit d’Aimé Jacquet, entraîneur de l’ASNL en 1990-1991. Il n’en est rien, et nous allons vous présenter aujourd’hui la personnalité remarquable qui a donné son nom à cette tribune.
Né le 22 septembre 1905 à Nancy, décédé le 13 août 1976 à Nancy.
Speaker et membre du comité du FC Nancy (1936-1964)
Speaker (1967-1975) et membre du conseil d’administration (1975-1976) de l’AS Nancy-Lorraine.
Né dans une famille protestante, Maurice Jacquet, fils d’un charcutier, passe son enfance dans le faubourg des Trois-Maisons où il fréquente les éclaireurs unionistes puis l’Union chrétienne des jeunes gens (UCJG) dont il est le président local en 1928-1929. Sur le plan professionnel, après son service militaire dans l’artillerie, il entre à la Compagnie lorraine d’électricité – absorbée par EDF au moment de la nationalisation de 1946 – et y travaille pendant trente-sept ans. À la fin de sa carrière, il était responsable d’un service comprenant une quarantaine d’agents.
Ancien premier prix de diction et de comédie au Conservatoire et ancien membre de la troupe réputée de Louis Fleurant, il est l’un des premiers comédiens de Radio-Lorraine. Fondateur de l’association des anciens élèves du Conservatoire, il siège au jury de nombreux concours. Il contribue également à la création de Lorraine-Loisirs après la Seconde Guerre mondiale puis en devient le président. Grande figure de Nancy, il en est conseiller municipal de 1962 à1970.
Tôt attiré par le sport, Maurice Jacquet lui consacre une grande partie de sa vie. Secrétaire du Stade universitaire lorrain (SUL) en 1923, il pratique tour à tour le rugby, l’athlétisme et le basket. Fondateur du Vespa-Club, secrétaire de l’AS Électro-Gaz, il entre au comité directeur du FC Nancy en 1936. Il officie également comme arbitre et comme speaker dans de nombreux stades de l’agglomération nancéienne. En 1946, il crée les émissions sportives sur les ondes de Radio-Lorraine et en assure les chroniques pendant une dizaine d’années, ce qui lui vaut une popularité certaine. Il devient ensuite secrétaire général de l’Office municipal des sports de Nancy.
Au sein du FC Nancy, Maurice Jacquet a occupé de nombreux rôles, souvent dans l’ombre. Parmi ses meilleurs souvenirs figurent les tournées à l’étranger pour accompagner l’équipe (Danemark, Allemagne, Angleterre, Espagne…). Avant cela, la victoire en Coupe de France de l’équipe fédérale Nancy-Lorraine en 1944, lors des heures sombres de l’Ocupation, lui avait déjà procuré une joie immense. C’est même lui qui, le soir même, avait eu l’honneur de dormir avec le précieux trophée dans sa chambre de l’Hôtel du Printemps à Paris : « Quelle nuit ! Je ne pouvais y croire. Pour être bien certain que la Coupe était là, je me levais de temps en temps pour la caresser. Qu’elle était belle ! ».
Son pire souvenir date du 26 septembre 1946. Ce jour-là, le FC Nancy dispute le premier derby de son histoire en championnat et subit une humiliante défaite (0-6) à Saint-Symphorien. Alors que tous les autres dirigeants du FC Nancy se sont trouvé une excuse pour ne pas assister au traditionnel repas d’après-match avec les dirigeants messins, c’est le dévoué Maurice Jacquet, homme de devoir, qui y représente le club : « Et c’est donc moi qui prit la parole pour remercier nos adversaires de leur accueil, et les féliciter de leur bon match. Une tâche bien difficile… Les mots sortaient mal. Je n’ai pas encore digéré cet affront », déclarait-il près de trente ans plus tard.
Une autre anecdote résume bien ses qualités morales : lorsqu’en 1958, au cours d’un match, Christian Bottollier, joueur emblématique du FC Nancy, subit une grave blessure mettant fin à sa carrière de joueur, et alors qu’il se retrouve sans ressources avec femme et enfants, et sans certitude de pouvoir remarcher, Maurice Jacquet le fait entrer à EDF pour qu’il s’occupe des entraînements et du secrétariat de la section football de l’Électro Gaz, l’un des principaux clubs omnisports de Nancy.
En 1964, peu de temps après la disparition de l’équipe professionnelle du FC Nancy, Maurice Jacquet prend longuement la parole au conseil municipal de Nancy dont il est membre depuis juillet 1962 pour interpeller le maire, ses adjoints et l’ensemble des conseillers municipaux sur l’immense perte que Nancy vient de subir. Cette intervention, belle et déchirante, peut être considérée comme l’oraison funèbre du club prononcée par un homme profondément meurtri par sa disparition.
D’emblée sympathisant du projet de création d’un nouveau club professionnel à Nancy, Maurice Jacquet devient en 1967 le premier speaker de l’histoire de l’ASNL. Il montre à l’égard du nouveau club le même dévouement et la même fidélité qu’au FC Nancy. Une illustration, parmi d’autres, réside dans ces quelques lignes publiées par Le Chardon rouge en 1972 : « Le supporteur numéro un de l’AS Nancy-Lorraine, en tout cas son ami le plus slncère, est vraisemblablement Maurice Jacquet. Sans se faire remarquer, exemple de modestie, ce grand serviteur du sport soutient l’ASNL à tous les Instants. Il est régulièrement à la gare pour accueillir l’équipe à son retour de déplacement. Bien sûr quand ce retour est glorieux il n’est jamais seul, mais au lendemain de Rennes-Nancy il n’y avait que lui pour attendre les joueurs à la gare. Ce sont ces élans de sympathie après une défaite sévère qui montrent quels sont les véritables amis. »
En 1975, la maladie contraint Maurice Jacquet à laisser sa place de speaker à Gérard Muller, mais il entre la même année au conseil d’administration du club. Il meurt le 13 août 1976, jour du premier match de la saison 1976-1977 à Marcel-Picot. De nombreux dirigeants (MM. Cattier, Cuny, Étienne, Bastien, Granger et le colonel Wagner) ainsi que plusieurs joueurs (Curbelo, Rora, Chenu…) représentent l’ASNL à ses obsèques célébrées le 17 août 1976 au temple protestant de la place Maginot. Son nom sera ensuite donné à une tribune du stade Marcel-Picot.
Ancien combattant prisonnier de guerre, Maurice Jacquet était titulaire de la Croix du combattant, de la Médaille d’or de l’éducation physique et des sports, officier d’Académie et chevalier de l’ordre national du Mérite.
admin@socios-nancy.fr août 5, 2025 Portraits