Les assises du supportérisme

Le jeudi 17 avril 2014, le Sénat a accueilli les premières Assises du supportérisme. Le but de ces assises était de positionner le supporter dans le paysage footballistique français. Pourquoi ? Depuis plusieurs années, les responsables politiques, les économistes, les journalistes et les supporters aboutissent au même constat : le modèle économique des clubs professionnels du football français est à bout de souffle. Cet état de fait a été acté par le rapport Glavany qui apporte des débuts de réponse. Parmi elles, on retrouve la proposition n°06 invitant à une meilleure implication des supporters dans la vie et la gestion des clubs. Comble de l’ironie, la commission «le Groupe de travail pour un modèle durable du football français», à l’origine de ce rapport, ne comptait aucun supporter en son sein ! L’argument employé pour justifier un tel état de fait est imparable : les supporters français n’étant pas organisés en une force structurée, on leur conteste la légitimité de siéger dans une telle instance. Pour ne plus voir les portes se fermer devant nous et imposer notre présence, l’association À La Nantaise, qui est en France le chef de file du mouvement pour une meilleure représentativité des supporters, a décidé de passer à l’action et d’organiser ces assises avec l’aide de Supporter Direct Europe, instance de coordination européenne des associations prônant une participation active des supporters à la vie des clubs de football professionnels.

Ces assises ont donc réuni des supporters venant de nombreuses régions françaises (Nantes, Rouen, Toulon, Metz, Paris, Saint-Étienne et bien sûr Nancy), des personnalités qualifiées (avocats, sociologues, économistes…) et des représentants des instances dirigeantes du football tels que Bernard Desumer (vice-président de la FFF et représentant de la LFP) et William Gaillard (directeur de la communication et des affaires publiques de l’UEFA). Vous trouverez ci-dessous la liste complète des intervenants.

Cette journée au Sénat a mis en évidence le manque flagrant de communication entre les instances dirigeantes du football français (clubs, FFF, LFP) et les supporters. Cette absence de dialogue n’a pas échappé à l’UEFA. Celle-ci, favorable à la mise en place dans chaque club d’un officier de liaison avec les supporters, place en la matière la France au même rang que la Moldavie et l’Azerbaïdjan. Un tel retard est d’autant plus surprenant que la formation de ces officiers, organisée par Supporter Direct et financée par l’UEFA, ne serait pas à la charge des clubs eux-mêmes. À titre de comparaison, nos voisins allemands mobilisent jusqu’à huit salariés par club pour assurer cette fonction ! On comprend pourquoi le modèle économique du football allemand est celui qui, dans les débats, est le plus souvent cité en exemple, non seulement pour son institutionnalisation du dialogue avec les supporters mais aussi en raison du fait que les clubs allemands sont détenus majoritairement par leurs membres (la fameuse règle du 50+1).

Et l’actionnariat populaire au sein des clubs français ? Il existe encore nombre de contraintes législatives, et seule une société par actions simplifiée (SAS) semble pour l’heure pouvoir être adaptée à une telle ambition. Pour autant, rien de fondamental ne s’oppose à de tels projets et il n’est pas dit que les réalités d’aujourd’hui seront celles de demain. L’actionnariat populaire, pour se réaliser, peut et doit être accompagné de tout un travail social effectué par les associations de supporters et par les clubs. Nous rentrons là dans le cadre de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Un club de football étant une société, il se doit de mettre en place une véritable politique RSE qui peut se décliner dans le stade avec des supporters citoyens, dans les centres de formation avec l’école et l’accompagnement dans la reconversion des jeunes footballeurs non retenus, dans un reporting social… Au-delà de ce qui semble les opposer, l’actionnariat populaire et la RSE sont en réalité très proche puisqu’ils reposent tous deux sur le dialogue et l’insertion des clubs de football professionnels dans leur communauté. Rien n’oblige les clubs mais rien ne les empêche, cela ne leur coûtera rien ou si peu mais cela peut leur rapporter gros en terme d’image, de dynamique, ou de rapprochement supporter /club. Il reste à convaincre les dirigeants des clubs français qu’ils n’ont rien à y perdre – cela ne leur coûtera rien ou presque à l’échelle de leur budget – mais surtout tout à y gagner en termes d’assise, d’image et de fidélisation.

Ces Assises du supportérisme ont donc constitué le moment opportun pour annoncer la création du Comité national des supporters de football (CNSF), laquelle répond aux demandes du gouvernement et des hautes instances du football français d’avoir en face d’eux un organisme représentatif des supporters. L’association À la nantaise, la Fédération des culs rouges de Rouen et les Socios Nancy sont les trois organisations fondatrices de ce comité. D’autres font déjà acte de candidature pour rejoindre le CNSF, et leur adhésion reposera sur des critères de représentativité, de démocratie et de transparence. Nous avons en effet le devoir de mettre nous-mêmes en pratique les principes que nous revendiquons auprès des clubs professionnels. Les Socios Nancy sont ainsi très fiers de faire partie des trois entités ayant donné naissance au CNSF et le voient comme une étape importante de leur développement mais aussi comme la récompense du travail réalisé depuis deux ans.

Le CNSF doit permettre de créer un espace de dialogue et de donner un avenir au football français. La conclusion des Assises du supportérisme est aussi la nôtre : il n’y aura pas de football durable sans supporters. Qu’on se le dise !

Liste des intervenants : programme

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